Pendant la pandémie de Covid 19, le dépistage du mélanome peut-il être « virtuel » ?

Août 4, 2021

Juillet 2021 – Le diagnostic du mélanome à un stade précoce est le garant d’une évolution favorable de ce cancer et permet d’en espérer la guérison. Dans la plupart des cas, les mélanomes sont repérés par les patients eux-mêmes ou leur entourage, ce qui les conduits habituellement à consulter rapidement leur médecin. Or pendant cette pandémie de Covid 19 et surtout pendant les périodes de confinement, beaucoup de personnes, se référant de façon excessive aux recommandations des instances sanitaires, ont eu tendance à éviter de se rendre dans les établissements de soins en dehors des situations d’urgence. Ainsi l’examen de leur lésion « suspecte » était-elle remise « à plus tard »…

Pourtant, même en ces temps troublés, il ne faut pas négliger sa peau. Les techniques de consultation à distance qu’il s’agisse de vidéos en temps réel ou de transmission de photos pour téléexpertise se sont révélées utiles pour les personnes vivant dans des zones éloignées de centres médicaux. Elles peuvent donc être proposées pour les patients fragiles susceptibles de souffrir d’une forme grave de Covid-19 mais chez lesquels il faut contrôler les lésions cutanées, pigmentées ou non. 

Pour autant le dépistage « virtuel » du mélanome n’est pas simple et se heurte à plusieurs écueils. Les photos que font les patients avec leur smartphone et qu’ils transmettent à leur dermatologiste ne sont pas toujours de qualité optimale. De plus tout le monde ne dispose pas d’un smartphone et d’une connexion internet adéquats.  L’idéal serait de prendre les photos avec un dermatoscope (instrument qui permet d’agrandir et d’éclairer la lésion) attaché au smartphone ce qui engendre évidemment un coût additionnel et une charge logistique supplémentaire. 

Une équipe (en Australie) propose, dans les circonstances actuelles de la pandémie, une démarche en deux étapes. 

Premièrement, former les patients (éventuellement en vidéo) à l’auto examen de la peau et à la détection de lésions suspectes en se basant sur la fameuse règle ABCDE (Asymétrie, Bordure irrégulière, Couleur inhomogène, Diamètre de plus de 5 mm, Evolutivité). 

Deuxièmement déterminer les lésions qui doivent être plus particulièrement surveillées en télédermatologie (avec ou sans dermatoscope mobile). Des recommandations peuvent être fournies pour des photos de qualité suffisante : en lumière naturelle, avec un fond neutre, en enlevant ou déplaçant tout bijou et toute chose pouvant faire de l’ombre (y compris la chevelure), en demandant si besoin l’aide de l’entourage en particulier pour les zones du corps difficiles à photographier soi-même, prendre à chaque fois deux photos, l’une faite à 20 cm de la lésion et centrée sur celle-ci, l’autre si possible avec le dermatoscope placé au contact de la peau. Bien sûr il faut noter l’endroit où se trouve la lésion photographiée, et d’un examen à l’autre si elle a changé de taille, de forme, d’épaisseur, de couleur etc…

Selon les auteurs de l’étude, cette méthodologie semble à même de permettre un suivi correct des personnes à risque de mélanome et autres cancers de la peau.

Comme dans de nombreuses autres spécialités médicales, la télédermatologie a connu un essor important au cours de ces derniers mois. En ce qui concerne le dépistage et la reconnaissance des cancers cutanés, persistent toujours quelques difficultés que l’on ne peut passer totalement sous silence…

Dr Marie-Line Barbet 

Janda M et coll. : Virtual melanoma checks during a pandemic. Br J Dermatol., 2020 Oct;183(4):752-753.doi.org/10.1111/bjd.19255

Actualité scientifique avec le soutien institutionnel de Novartis