Novembre 2019 – Le traitement d’un mélanome débutant se résume le plus souvent à une intervention chirurgicale. Pour assurer le meilleur pronostic possible, il est important d’enlever une zone de peau saine autour de la tumeur : c’est ce qu’on appelle la marge d’exérèse. La largeur de celle-ci est définie par les données de l’examen au microscope.
Par exemple pour une tumeur d’épaisseur de moins de 1 mm, la marge d’exérèse sera de 1 cm et pour une tumeur n’atteignant pas le derme (mélanome in situ limité à l’épiderme) la marge est de 0,5 cm. Cela semble à première vue supportable mais en réalité, dans certaines localisations et notamment sur le visage, devoir ôter 2 à 4 centimètres carrés de peau par exemple nécessite une réparation en chirurgie plastique et le résultat peut être très affichant.
Or, pour certaines autres tumeurs cancéreuses cutanées, les carcinomes baso-cellulaires notamment, moins dangereux que les mélanomes mais devant aussi être enlevés avec une marge de peau saine, il peut être proposé (lorsque la lésion siège sur le nez ou au coin de l’œil, ou des lèvres, ce qui est fréquent), de pratiquer une chirurgie micrographique de Mohs. Il s’agit ici de retirer la tumeur progressivement par petites couches. Chaque couche est examinée au microscope dans la salle d’opération. Lorsqu’il n’y a plus de cellules cancéreuses, on peut alors terminer l’intervention. Cette méthode permet de laisser en place la plus grande quantité possible de tissu sain tout en enlevant complètement le cancer.
La chirurgie de Mohs semble de plus en plus souvent pratiquée dans le traitement du mélanome débutant sans atteinte ganglionnaire… du moins aux Etats-Unis où une étude vient d’être réalisée pour déterminer la sécurité de cette technique par rapport à ce qui prévaut dans les recommandations officielles, c’est-à-dire le respect de marges d’exérèse larges.
Les dossiers des patients figurant dans la base de données des cancers aux USA (National Cancer Data base) et chez lesquels avait été porté un diagnostic de mélanome entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2014 ont été revus. Au total il y en avait…70 319 parmi lesquels 3 234 ont bénéficié d’une chirurgie de Mohs. Etonnamment il a été constaté que les malades opérés par cette technique avaient un taux de survie légèrement meilleur que ceux opérés de manière traditionnelle, la comparaison étant faite évidemment entre des cas de même gravité.
Ceci suggère que la technique de Mohs pourrait donc être employée en toute sécurité pour le traitement de mélanomes malins débutants dans certaines localisations, ce qui permettrait de meilleures suites esthétiques et fonctionnelles. En France, ce type de chirurgie reste encore peu pratiqué et est surtout réservé aux carcinomes. Mais cette situation va sans doute évoluer.
Dr Marie-Line Barbet
Cheraghlou S et coll. : Comparison of Survival After Mohs Micrographic Surgery vs Wide Margin Excision for Early-Stage Invasive Melanoma.
JAMA Dermatol. 2019 Sep 25. doi: 10.1001/jamadermatol.2019.2890.