Pour le dépistage du mélanome, faites confiance au « vilain petit canard » !

Fév 28, 2017

Février 2017 – Il existe peu de variétés de grains de beauté (ou nævus) : ils peuvent être plats ou en relief, plus ou moins réguliers et de teinte (pigmentation) plus ou moins foncée. En général chez une même personne les nævus ont souvent pratiquement tous le même aspect. Or il y a une vingtaine d’années, des dermatologistes français avaient noté qu’un nævus différent de tous les autres chez un même individu devait faire craindre qu’il s’agisse en fait d’un mélanome. Ils avaient baptisé cette situation de « signe du vilain petit canard ».  Depuis les dermatologues se réfèrent à ce signe quand ils examinent un patient pour le dépistage du mélanome.


Une équipe de dermatologistes français a voulu vérifier la pertinence de ce signe. Pour cela, ils ont sélectionné neuf dermatologues auxquels ils ont présenté (à chacun) 2 089 images numériques de naevus prises chez 80 patients ainsi que 766 images de vues dermoscopiques (telles qu’elles apparaissent lors d’un examen au dermoscope, sorte de loupe avec une source lumineuse) provenant d’un sous-groupe de 30 de ces patients.

Il était demandé aux spécialistes d’identifier, parmi les images (cliniques ou dermoscopiques) présentées ensembles des nævus d’un même patient, celui (ou ceux) qui n’était pas comme les autres, autrement dit le « vilain petit canard. » Dans un deuxième temps, ils ont été conviés à préciser sur des images séparées si le nævus qu’on leur montrait était suspect, c’est-à-dire s’il méritait d’être enlevé pour être analysé.

En moyenne chaque patient avait 26 nævus.

Certes le nombre de nævus considérés comme des vilains petits canards ou suspects a été variable en fonction des dermatologistes que ce soit sur les images cliniques ou dermoscopiques. Mais il est à noter que tous les mélanomes dont étaient atteints certains de ces patients ont été qualifiés de « vilain petit canard » et de lésion suspecte par les 9 dermatologues sur les images cliniques et dermoscopiques.

Les résultats de cette « expérience » montrent que le signe du vilain petit canard est en effet très utile dans le dépistage du mélanome malin. De plus les dermatologues qui y ont participé constatent que lorsqu’ils trouvaient une lésion suspecte, le fait de disposer des images des autres nævus du patient leur permettant de vérifier s’il s’agissait ou non d’un « vilain petit canard », leur donnait une confirmation diagnostique supplémentaire les incitant à une exérèse ou au contraire les conduisant à y renoncer.

Une nouvelle illustration de la nécessité d’un examen de la peau dans son ensemble pour le dépistage des mélanomes…par le médecin mais aussi par le patient lui-même qui devra donc être vigilant face aux vilains petits canards !

Dr Marie-Line Barbet

Gaudy-Marquest C et coll. : Ugly Duckling Sign as a Major Factor of Efficiency in Melanoma Detection. JAMA Dermatol. 2017; publication avancée en ligne le 8 février.  doi:10.1001/jamadermatol.2016.5500