Janvier 2017 – Le diagnostic du mélanome repose actuellement sur l’examen clinique au mieux avec un dermatoscope (sorte de loupe puissante avec une source lumineuse). Lorsqu’une lésion, qui a habituellement l’aspect d’un grain de beauté ou naevus, semble suspecte, elle est enlevée chirurgicalement généralement en totalité ou partiellement (biopsie) pour être analysée. Mais mêmes les spécialistes les plus expérimentés peuvent faire l’erreur de considérer qu’un naevus est bénin alors qu’il s’agit d’un mélanome et décider de ne pas le retirer avec toutes les conséquences que cela suppose. Disposer d’un autre moyen pour faire le diagnostic de mélanome serait donc tout à fait bienvenu.
Ceci va peut-être être bientôt possible grâce aux travaux d’Alexandre Akoulitchev de l’université d’Oxford au Royaume-Uni.
Celui-ci s’est basé sur le fait qu’une petite quantité des cellules qui fabriquent la mélanine (le pigment qui donne sa couleur à la peau), c’est-à-dire les mélanocytes, normalement cantonnés à la peau, est retrouvée flottant librement dans le sang. Or en cas de mélanome, les mélanocytes sont anormaux : l’ADN contenu dans leur noyau présente des anomalies. Ainsi l’idée d’A Akoulitchev est que dans une simple prise de sang, il devrait être possible de retrouver ces mélanocytes anormaux suggérant l’existence d’un mélanome.
Encore faut-il préciser quelles sont ces anomalies de l’ADN significatives du mélanome, autrement dit « ses signatures ». Pour les identifier, l’équipe a eu recours à une population de 600 patients australiens dont certains avaient un mélanome et les autres non. L’examen de l’ADN des mélanocytes a permis de découvrir 15 anomalies présentes chez les uns et pas chez les autres.
La valeur de ces 15 « signatures » a été vérifiée auprès de 119 patients américains de la célèbre Mayo Clinic : la moitié d’entre eux avaient un mélanome, 20 étaient en parfaite santé et les autres avaient soit des lésions pigmentées liées à l’âge (les taches de vieillesse…) soit des cancers de la peau ne correspondant pas à un mélanome. Le test recherchant les 15 anomalies, dénommé EpiSwitch, appliqué à ces personnes s’est révélé dans plus de 80 % des cas capable d’identifier celles qui avaient un mélanome.
Ces résultats sont encourageants et on imagine que ce test pourrait aider à un diagnostic et à un traitement chirurgical plus précoces des mélanomes et ainsi potentiellement sauver des vies.
Malheureusement, regrettent les chercheurs, les organisations de la santé se montrent frileuses envers cette nouvelle approche. L’avenir dira s’ils ont tort ou raison.
Dr Marie-Line Barbet
Jakub JW et coll. : A pilot study of chromosomal aberrations and epigenetic changes in peripheral blood samples to identify patients with melanoma. Melanoma Res. 2015 Oct;25(5):406-11. doi: 10.1097/CMR.0000000000000182.