Risque maximal avant 25 ans et au-delà de 10 séances
Juin 2014 – Les autorités sanitaires ont depuis quelques années mis l’accent sur les dangers de l’exposition aux rayons ultra violets (UV) artificiels avec en particulier davantage de risque, pour les « consommateurs », de développer un mélanome malin. Mais de nombreuses questions restent sans réponse : le danger existe-t-il quel que soit le nombre de séances, est-il le même pour tous et dans tous les pays, peut-on le quantifier ?
Pour tenter de répondre à ces interrogations, une équipe de dermatologues américains a examiné trente-sept articles publiés dans les revues médicales au cours des dernières décennies sur les relations entre la fréquentation des cabines de bronzage et la survenue de mélanomes. Au total, les études décrites dans ces articles ont concerné 251 808 personnes sur différents continents (Amérique du Nord, Europe, Océanie) dont 16 667 avaient un mélanome et les autres non. Pour toutes ont été examinées les habitudes de « consommation » d’UV artificiels.
Ceci a permis de constater que par comparaison à celles qui ne sont jamais allées dans une cabine de bronzage, les personnes qui y ont eu recours ont globalement une augmentation de 16 % du risque de développer un mélanome, le chiffre étant même plus élevé en Amérique du Nord (23 %) probablement du fait de l’absence de limitations en intensité des UV délivrés, alors que de telles mesures existent en Europe, Australie et Nouvelle-Zélande.
Toutefois, la durée d’exposition joue aussi : lorsque celle-ci ne s’est pas poursuivie plus d’un an au cours de la vie, l’augmentation de risque individuel est de 37 % mais elle atteint 61 % avec des expositions pendant plus d’un an. En terme de nombre de séances, il semble exister un « effet seuil » avec un accroissement de risque de 34 % avec plus de 10 séances au cours de la vie tandis que le danger avec moins de 10 séances ne semble pas significatif. Par ailleurs, ceux qui ont débuté leur consommation d’UV avant 25 ans encourent un risque plus élevé que ceux qui ont commencé après 25 ans (+ 35 % contre + 11 %).
Enfin, il n’a pas été constaté de différence dans les résultats des études menées avant et après 2000, c’est-à-dire après l’apparition de nouvelles cabines de bronzage avec des technologies réputées plus sûres, mais qui ne semblent pas se traduire par une diminution du risque de mélanome.
Il faut toutefois souligner quelques limites de cette étude et en particulier le fait que les sujets qui fréquentent les cabines de bronzage sont peut-être aussi ceux qui s’exposent le plus au soleil…
Malgré ces réserves, tout ceci confirme, s’il en était besoin les dangers de l’exposition aux UV artificiels face au risque de mélanome. Ce travail mené par ces dermatologues américains apporte donc quelques précisions en quantifiant l’importance du risque et en montrant qu’il est particulièrement marqué au-delà de 10 séances et lorsque l’exposition est débutée avant 25 ans.
Pour autant, ces constatations pourraient d’inquiéter les patients qui sont traités par les ultraviolets, c’est-à-dire par photothérapie, pour différentes dermatoses, même s’ils sont prévenus des risques de ce type de prise en charge. La photothérapie utilise soit les UVB (à large spectre ou à spectre étroit), soit les UVA longs, soit les deux en association avec parfois prise préalable d’un photosensibilisant (PUVA thérapie). Elle est proposée dans différentes maladies cutanées lorsqu’elles sont étendues et non contrôlées par les traitements habituels : psoriasis, lymphomes, dermatite atopique, photodermatoses…Plusieurs séances par semaine (3 en général) sont nécessaires pendant une dizaine de semaines et les doses d’UV délivrées (en cabine) progressivement croissantes. Le risque de favoriser l’apparition de cancers cutanés (carcinomes et mélanomes) est une préoccupation constante des prescripteurs.
Ainsi la photothérapie est-elle écartée pour les patients qui ont déjà eu un cancer de la peau ou ont des lésions précancéreuses cutanées, voire présentent un risque particulier face au développement de ces cancers. Et c’est au médecin qu’il appartient de peser soigneusement le rapport entre le bénéfice espéré et les dangers potentiels du traitement.
Dr Marie-Line Barbet
Colantonio S et coll. : The association of indoor tanning and melanoma in adults: Systematic review and meta-analysis. J Am Acad Dermatol 2014; 70: 847-57.